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France: Discours de Jean-Louis Borloo à l’Assemblée nationale sur le projet de loi relatif aux biotechnologies

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Paris, France
April, 2008

Source: Ministêre de l'Ecologie et du Développement Durable

Monsieur le Président,
Monsieur le Président de la Commission des affaires économiques, Cher Patrick OLLIER,
Monsieur le Rapporteur, Cher Antoine HERTH,
Mesdames et Messieurs les Députés,

Je serai bref, car nous connaissons tous ici la raison profonde de ce débat sur les biotechnologies, dont les plantes génétiquement modifiées sont une illustration parmi d’autres. Nous devons sortir en toute lucidité et en toute conscience de 10 ans d’esquive et d’amalgames, 10 ans pendant lesquels la situation de fait de ces biotechnologies agricoles fut une situation de non-droit.

Sur ce sujet complexe, encore à l’aube de ses développements possibles, il s’agit aujourd’hui de construire un cadre juridique responsable, après en avoir pesé tous les aspects, y compris à moyen et long terme.

Je voudrais d’abord bien clarifier la situation actuelle.
A la demande du Président de la République et conformément aux conclusions du Grenelle de l’environnement, le 25 octobre dernier, le Gouvernement français a interdit la seule culture OGM pratiquée en France et autorisée par la commission européenne : le maïs Monsanto 810. La France, appliquant le principe de précaution, a fait jouer la clause de sauvegarde et l’a notifiée à Bruxelles. J’observe que depuis la Roumanie a pris la même décision.

Par ailleurs, le président de la République avait souligné le 25 octobre « l’obligation de prouver l’intérêt sanitaire et environnemental des OGM ». Au dernier Conseil européen, le Gouvernement français a demandé que soient réévaluées les procédures d’expertises européennes en matière d’autorisation d’OGM. Il fut suivi en cela par une majorité d’Etats membres. De surcroît, le Commissaire à l’environnement vient d’exprimer un avis plutôt défavorable à l’égard de la demande d’autorisation du Bt11. Des questions sont donc bien posées sur les effets complexes de ces opérations sur le génome, et pas seulement en Europe : aux Nations-Unies, en Australie, en Chine, en Inde.

La situation aujourd’hui est donc claire : l’année dernière 22 000 hectares de maïs OGM 810 étaient cultivés en France ; aujourd’hui, il n’y a plus de plante génétiquement modifiée cultivée en France.

Le débat dans cette situation peut donc s’engager de façon plus sereine, afin d’élaborer un cadre satisfaisant, scientifiquement et juridiquement. Comme l’ont montré les discussions au Sénat, lors de la première lecture un débat approfondi est possible ; c’est un sujet d’une extraordinaire complexité dans lequel chacun peut avoir des interrogations sincères et légitimes.

Les biotechnologies font partie des perspectives incontournables du 21ème siècle. Elles contiennent peut-être des solutions au traitement des maladies neurodégénératives ; elles sont une des directions de recherche en agriculture, peut-être une des voies possibles pour réduire les besoins en eau des cultures ; elles sont une des voies industrielles dans tout le génie enzymatique et microbiologique. Leurs usages doivent répondre à nos intérêts économiques et sociaux, qui dans la compétition internationale confortent l’avantage structurel de l’agriculture et de l’agro-alimentaire français : la qualité, la diversité, la traçabilité, autant de valeurs, de marchés, qu’il ne faut pas laisser capturer par d’autres.

En tout état de cause, elles font partie des technologies que nous devons absolument regarder de près, parce qu’elles recourent à des procédés souvent inédits et toujours puissants, qu’elles concernent déjà dans la pratique des végétaux et des animaux. Parce qu’elles occupent une grande place dans la guerre des brevets. Parce que leurs effets, touchant à l’organisation même du vivant, sont encore plus complexes que ceux des procédés chimiques ou physiques. Les biotechnologies font déjà partie des techniques qui auront le plus d’incidence sur nos activités, nos références sur le vivant et bientôt sur nous-mêmes. Notre honneur politique est d’en sortir par le haut : il s’agit de faire de ces technologies ce que nous voulons, et pas nous y soumettre.

C’est dans ce contexte que ce projet de loi que Nathalie va vous expliciter plus avant, entend mettre un terme à plusieurs années de non-dits, de laisser faire et d’irresponsabilité.

La société est extrêmement attentive aux nouvelles technologies qui lui sont proposées, surtout lorsqu’elles concernent le vivant et l’alimentation. Elle nous a demandé de dépasser la polémique, les a priori, de voir plus loin que le temps médiatique et les approches sectorielles étroites. C’est ce qu’a exprimé le consensus du Grenelle de l’Environnement le 25 octobre dernier.

A l’unanimité de tous les collèges, je me permets de vous en relire les termes, page 19, la société française a voulu que soit assuré un « cadre rigoureux et transparent pour les OGM et les biotechnologies ». C’est bien ce que tente ce projet de loi.

A l’unanimité des collèges, elle a demandé de « renforcer la recherche autour des biotechnologies et des OGM », avec tout l’éventail des disciplines concernées : « renforcer les disciplines suivantes : écotoxicologie, toxicologie, écologie, épidémiologie, agronomie, écologie microbienne, économie agricole ». C’est ce que nous avons fait, en triplant le budget correspondant avec 45 millions d’Euros consacrés aux biotechnologies sur trois ans. Le débat sur une variété particulière de plante génétiquement modifiée, le Mon 810, ne doit pas occulter cette accélération programmée des recherches en toutes disciplines autour des biotechnologies.

A l’unanimité des collèges, elle a demandé une « Haute Autorité des biotechnologies » créée par la loi, « de composition diversifiée », qui substitue aux commissions existantes et « dispose des moyens propres d’une expertise scientifique indépendante, pluridisciplinaire et citoyenne qui puisse s’autosaisir et être saisie largement, y compris par les citoyens ». Qui adopte « des avis transparents, publics et multidisciplinaires sur chaque OGM végétal et animal, sans se substituer à l’échelon politique de la décision ». Qui « couvre par ses avis la mise en culture, l’importation, la consommation animale ou humaine par l’évaluation dans la durée des impacts environnementaux sanitaires et socio-économiques selon les critères du développement durable ». C’est ce que nous avons prévu dans le projet de loi qui vous est soumis.

A l’unanimité des collèges, en l’absence d’assurance scientifique suffisante et en l’absence de cadre de responsabilité, elle a demandé le « traitement à court terme des variétés autorisées » et « l’activation de la clause de sauvegarde sur une plante génétiquement modifiée, le Monsanto 810 ». Cette clause a été activée, et une modernisation des méthodes d’évaluation sera engagée au niveau européen, la France y jouant tout son rôle de grand acteur scientifique et économique.

A l’unanimité de tous les collèges, enfin, la société a demandé une loi, non pas pour interdire ou pour autoriser les biotechnologies et les OGM, de façon grossière et en amalgamant toutes les questions. Elle a demandé une loi qui organise les responsabilités de chaque acteur, en pleine connaissance des interrogations et des enjeux ; un cadre qui corresponde aux plus fortes demandes de la société française ; un cadre qui protège la biodiversité, élément crucial de notre avenir ; un cadre qui protège les cultures sans OGM, un cadre qui protège le faible. C’est le rôle même de la loi.

Quelles sont ces demandes ?
A nouveau, nous pouvons en relire les termes unanimes des collèges :

« Responsabilité ;
Principe de précaution ;
Transparence et participation ;
Libre choix de produire (règles de coexistence) et de consommer sans OGM. ».

Cette loi est probablement imparfaite aux yeux d’un certain nombre d’acteurs ; elle n’en rompt pas moins avec le laisser-faire de la décennie précédente.

En effet, quelle était la situation avant la loi qui nous rassemble aujourd’hui ? Dès qu’une autorisation était donnée au niveau communautaire, avec des méthodes d’expertise qui ont plus de 10 ans, tout acteur, sur toute parcelle, sans responsabilité juridique, sans assurance, sans transparence, sans précaution, pouvait vendre et exploiter à l’air libre un organisme génétiquement modifié. Cette situation était celle du seul OGM autorisé à la culture en France. Une situation de vide juridique et politique exorbitante par rapport à n’importe quel produit industriel, n’importe quelle activité économique. Curieusement, l’utilisation confinée, a priori plus maîtrisable, était bien plus encadrée que leur utilisation à l’air libre !

Enfin, le droit à la recherche n’était pas affirmé, et on voit combien l’amalgame entre la culture de ce maïs et les activités des chercheurs était préjudiciable à la recherche française et aux relations à l’intérieur de notre société.

Voila Mesdames et Messieurs les Députés, ce projet de loi est un acte de courage et de foi. Un acte de courage parce que, pour la première fois, nous décidons collectivement de sortir de l’impasse après des années d’hésitation et de doutes. Et puis un acte de foi parce que notre pays regarde vers l’avenir, vers la recherche, vers le progrès au service de l’homme. Il est indissociable des positions que le Gouvernement a pris en matière de clause de sauvegarde, d’exigence sur l’expertise et du développement très fort pour l’agriculture biologique et diversifiée.

C’est à vous maintenant qu’il revient de mettre un terme au flou juridique, économique et politique qui suscite la méfiance, décourage l’investissement et ne règle aucune question.

Certes le Gouvernement avait présenté un texte plus encadrant et continuera de le défendre avec conviction, mais c’est au Parlement au dernier ressort qu’il revient de voter la loi.

Pour finir, je voudrais dire ceci : cette loi ne décide pas que la société soit pour ou contre les biotechnologies, pour ou contre les OGM, qui n’en sont qu’un exemple : cela n’aurait pas de sens. Elle a pour vocation de répondre aux aspirations de notre temps : la transparence, la qualité, la prévention des dégâts prévisibles, la précaution vis-à-vis des dommages potentiels graves, la liberté de choisir son mode de production ou de consommation, la protection de la diversité biologique, le respect du droit et de la propriété privée. Elle doit bâtir le cadre d’une confiance retrouvée, confiance que seul un régime de transparence et de responsabilité, équitable et proportionné, scientifiquement et socialement construit, est capable de rétablir.

C’est la mission qui est la vôtre aujourd’hui, elle est importante, et je vous remercie de l’assumer.

 

 

 

 

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