France
November 12, 2007
Le haricot commun (Phaseolus
vulgaris) est une source majeure de protéines pour
l'alimentation humaine, en particulier dans de nombreux pays du
Sud. Or les rendements y sont particulièrement faibles. Grâce à
une symbiose avec des bactéries (rhizobia), le haricot peut
croître normalement sur des sols pauvres sans ajout d’engrais
azotés coûteux et potentiellement polluants. Dans le cadre du
projet européen AQUARHIZ*, les chercheurs de l’INRA,
en collaboration avec l’Université de Frankfort et le Centre
international pour l’agriculture tropicale, ont identifié des
gènes impliqués dans la capacité du haricot à produire dans des
sols de faible fertilité des zones méditéranéennes.
Le haricot commun a été domestiqué il y a plus de 6000 ans en
Amérique du Sud et Centrale. Il est aujourd’hui cultivé sur tous
les continents. Il est une source majeure de protéines pour
l'alimentation humaine dans de nombreux pays du Sud. Or les
rendements y sont particulièrement faibles (0,5-0,7 t/ha) en
comparaison des potentiels atteints dans les pays développés
(2,5-3,5 t/ha).
Grâce à une symbiose avec des bactéries (rhizobia), le haricot,
en tant que légumineuse, peut croître sur des sols pauvres sans
ajout d’engrais azotés coûteux et potentiellement polluants. Ces
bactéries du sol induisent en effet la formation de nodules sur
les racines, et parfois les tiges, de légumineuses dans lesquels
elles transforment l’azote atmosphérique (N2) en ammonium (NH4+)
que la plante utilise pour sa synthèse de protéines.
Cette fixation d’azote exige toutefois une intense respiration
qui dépend de la perméabilité des nodules à l’oxygène. Or cette
perméabilité est perturbée par le manque d’eau ou l’excès de
sel, ou encore par les carences en phosphore qui sont de fortes
limitations environnementales à la symbiose rhizobienne dans les
sols des zones méditerranéennes et tropicales.
Sélectionner des lignées performantes pour la fixation
symbiotique de l’azote sous contraintes osmotiques
Dans une coopération entre le CIAT et l'INRA sur la biodiversité
des haricots d’Amérique Latine, des symbioses à forts potentiels
de fixation symbiotique de l'azote et d’efficacité d'utilisation
de phosphore, ont été identifiées. Les lignées les plus
performantes, comme BAT 477 sélectionnée aussi pour sa tolérance
à la sécheresse, ont été croisées avec des variétés d'importance
agronomique comme DOR 304, largement cultivée pour sa tolérance
au virus de la mosaïque dorée.
C’est parmi la descendance de ce croisement que des lignées
contrastantes ont été sélectionnées dans le cadre de la
plate-forme d'Agropolis, puis utilisées dans le projet européen
AQUARHIZ, dans l’objectif de comprendre les mécanismes et
rechercher les gènes impliqués dans la capacité du haricot à
produire dans des sols de faible fertilité (déficience en
phosphore et azote), sous contraintes osmotiques (manque d’eau,
excès de sel) des zones méditerranéennes.
Identifier les gènes impliqués dans les plantes à fort
potentiel de fixation symbiotique de l’azote
L’ARN du cortex nodulaire, où s’opère la variation de
perméabilité, a été extrait des différentes lignées puis
transféré vers GeneXpro (Université de Frankfort) où la
recherche de gènes candidats est effectuée par la méthode de
SuperSage, développée initialement pour le génome humain. Plus
de 50 gènes se sont avérés sur- ou sous- exprimés dans les
nodules en réponse au choc salin. On y trouve en particulier des
gènes codant pour des phosphatases (enzymes responsables de la
solubilisation du phosphate).
Afin de comprendre la fonction de ces gènes dans la symbiose,
des méthodologies de biologie moléculaire ont été mises au point
pour localiser, voire quantifier, l’expression des gènes dans
divers tissus nodulaires, dont le cortex interne.
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Afin
de comprendre la fonction de ces gènes dans la symbiose,
la méthodologie d’in situ RT-PCR avec des amorces de
phosphatase acide, a été adaptée à des coupes nodulaires
de 50 µm d’épaisseur. Le signal correspondant en vert
permet de localiser et quantifier l’expression de gènes
PA dans divers tissus nodulaire, dont le cortex interne
(CI). |
La confrontation des données
moléculaires, ainsi obtenues à l’échelle cellulaire, et celles
de mesures biophysiques à l’échelle plante entière, permettent
d’établir que des phosphatases sont impliquées dans l’adaptation
de la fixation d’azote du haricot à une salinité modérée.
Les lignées sélectionnées dans le projet se sont révélées
suffisamment intéressantes pour qu’elles soient conservées comme
outil de recherche sur de nouveaux programmes internationaux
(concernant la bactériologie et le criblage de gènes de
légumineuses) pour l’amélioration du haricot et l’utilisation de
légumineuses dans des sols peu fertiles, en particulier dans le
cadre du projet intégré GRAINLEGUME de l’Union Européenne, le
consortium PHASEOMICS (sur la génomique du haricot) et le groupe
de recherche coopératif FABAMED (sur la fixation d’azote dans le
bassin méditerranéen) et le projet N&P de l'AIEA-FAO.
* La culture des légumineuses améliore la fertilité des sols
mais elle est peu compétitive, en particulier dans le bassin
méditerranéen où leur rendement est souvent limité par le manque
d’eau. L’objectif du projet AQUARHIZ est de stabiliser le
rendement du haricot, ainsi que du pois-chiche et de la fève en
Algérie, Egypte, Maroc et Tunisie.
La conférence européenne sur les légumineuses à Lisbonne (12-16
novembre) sera l’occasion de réviser les résultats obtenus dans
le cadre du projet AQUARHIZ ainsi que ceux du projet intégré
GRAINLEGUME dont l’objectif est de développer de nouvelles
stratégies pour accroître l’utilisation des légumineuses à
graine pour l’alimentation animale en Europe, mais aussi pour un
contexte plus large. La conférence rassemble des experts de
nombreuses disciplines dans le cadre de 13 sessions pleinières
couvrant une large gamme de thèmes tels que génomique,
adaptation aux contraintes biotiques et abiotiques, biologie de
la semence, nutrition et santé, systèmes de culture,
agro-écologie, environnement et économie globale des
légumineuses à graines. En outre, quelques 16 séminaires sont
organisés en plusieurs sessions parallèles afin d’encourager des
échanges d’idées en petits groupes sur des thèmes animés par des
modérateurs choisis par le comité scientifique. |
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