France
February 27, 2007
Source:
INRA
Dossier SIA - Carbone renouvelable et énergie verte
La France est le deuxième producteur européen de colza. La
graine de colza est utilisée pour produire de l’huile à usage
alimentaire ou industriel. L’huile de colza fournit en
particulier le carburant biodiesel qui est mélangé actuellement
au gazole. Ce débouché s’amplifie avec la volonté affichée en
Europe de développer les biocarburants pour diminuer
progressivement la consommation de carburants fossiles. Mais la
compétitivité de cette filière dépendra en grande partie de
l’amélioration de son bilan énergétique et notamment des
techniques d’extraction de l’huile. Les chercheurs de l’INRA
développent de nouvelles recherches sur les oléosines, des
protéines particulières qui semblent avoir un rôle déterminant
dans le stockage et la mobilisation des lipides des graines
d’oléagineux.
Le remplacement progressif du carburant fossile par du
biocarburant devient une nécessité, soutenue dès 2003 par des
directives européennes. La France projette de remplacer 5,75% de
carburant fossile par du biocarburant en 2010. L’éthanol de blé
et de betterave à sucre, l’huile des oléagineux sont en lice
pour atteindre cet objectif.
En France, le biocarburant privilégié est pour l’instant le
biodiesel provenant de l’huile de colza. Le biodiesel, ou
diester, est mélangé réglementairement au gazole jusqu’à 5%. Il
reste toutefois des progrès à accomplir dans les méthodes
d’extraction de l’huile pour exploiter complètement les
ressources du colza. En effet, l’extraction de l’huile des
graines de colza nécessite actuellement leur cuisson puis un
pressage complété par une extraction avec un solvant. La «
désolvantation » du tourteau est réalisée par un traitement
thermique qui a un impact négatif sur les protéines et sur leur
usage pour l’alimentation animale.
Identifier les facteurs
clés du stockage des lipides dans la graine
In: Biochemistry & Molecular Biology of Plants
Buchanan, Gruissem and Jones, ASPP, Rockville
(2000) |
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A : oléosome vu en
microscopie électronique,
B : schéma d’un oléosome,
C : détail |
Pour développer des méthodes
d’extraction plus douces et plus efficaces, il est nécessaire
d’identifier les facteurs cellulaires et moléculaires qui
régissent le stockage des lipides.
Les plantes oléagineuses stockent les lipides dans des
structures spécialisées appelées oléosomes contenus dans les
cellules de l’embryon dans la graine. Lorsque la graine germe,
les réserves lipidiques sont libérées et mobilisées pour la
croissance de la nouvelle plantule. Les oléosomes sont
constitués d’un coeur de lipides neutres hydrophobes, entouré
d’une monocouche de phospholipides, elle-même stabilisée par des
protéines particulières appelées oléosines.
Les oléosomes, considérés jusqu’ici comme d’inertes sacs de
lipides, sont en train de gagner le statut d’organites ayant une
structure organisée, au fur et à mesure que les connaissances
progressent. Les biologistes, de plus en plus intéressés,
découvrent que, outre les oléosines, qui ont un rôle
essentiellement structural, l’enveloppe des oléosomes contient
de nombreuses enzymes actives, dont les rôles ne sont pas tous
connus. Certaines protéines pourraient capter des signaux
cellulaires, régulant finement le rôle des oléosomes, leur
déplacement dans la cellule et leurs liens avec les autres
compartiments cellulaires.
Ce que l’on connaît actuellement des oléosines chez les végétaux
laisse à penser qu’elles ont un rôle majeur dans la formation et
la stabilité des oléosomes et par suite, dans leur résistance
lors de l’extraction des lipides. Elles déterminent en
particulier la taille des oléosomes, qui conditionne elle-même
leurs propriétés fonctionnelles. Les oléosomes de colza, maïs,
coton, lin sont petits et presque entièrement recouverts de
protéines. Ils sont résistants à la dessication dans la plante
in vivo, mais aussi aux traitements physiques et chimiques en
laboratoire. Au contraire, les oléosomes de la chair d’avocat ou
d’olive par exemple, non soumis à la dessiccation, sont beaucoup
plus gros et quasiment dépourvus de protéines de surface.
Les oléosines
Les chercheurs de l’INRA ont purifié deux oléosines chez
Arabidopsis thaliana, plante modèle du colza.
Ces protéines, très conservées entre les différentes espèces,
ont une structure pour le moins atypique : elles contiennent un
domaine central d’environ 70 acides aminés hydrophobes, le plus
grand segment hydrophobe connu chez une protéine. Cette
structure fait des oléosines des protéines aux propriétés
tensio-actives particulièrement intéressantes. Elles pourraient
constituer en elles-mêmes une source de tensio-actifs verts
exploitable, d’autant qu’elles sont relativement abondantes dans
la graine (4% en poids).
Pour étudier le rôle d’une protéine, un des moyens classiquement
utilisés consiste à obtenir des mutants dans lesquels la
protéine ne s’exprime pas et d’en analyser les conséquences. Les
chercheurs de l’INRA ont ainsi isolé des mutants pour
l’expression de différentes oléosines chez Arabidopsis thaliana.
Ces mutants vont servir de point de départ à de multiples
investigations. Comment sont modifiés la morphologie, le contenu
en lipides et la stabilité des oléosomes de ces mutants ?
Quelles protéines semblent les plus importantes pour les
propriétés d’extractibilité ? Pour cela, en partenariat avec le
Centre technique interprofessionnel des oléagineux
métropolitains (CETIOM), différents essais de micro-pressage
seront réalisés pour modéliser l’extraction de l’huile et le
comportement des graines de mutants.
Les mêmes études seront conduites sur les mutants correspondants
chez le colza, afin de transposer ces données fondamentales à
l’espèce d’intérêt agronomique. Les oléosomes d’un de ces
mutants, obtenus par voie chimique, s’avèrent d’ores et déjà
plus gros que chez la plante de départ.
Ces recherches ont un intérêt à la fois agronomique, pour la
capacité de germination des plantes et un intérêt industriel,
pour l’extraction de l’huile et des protéines. Elles
s’inscrivent dans un programme appelé Genobodies, présenté dans
le cadre du groupement d’intérêt scientifique Génoplante et
financé par l’Agence nationale de la recherche. Outre l’équipe
de Chimie biologique de Grignon, il implique des unités de
recherche INRA de Versailles, Rennes, Nantes, INRA/CNRS de
Montpellier et le CETIOM à Pessac. |
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