Paris, France
August 31, 2006
Spécial « Innov-Agri » du 5 au 7
septembre 2006
Le blé tendre, utilisé en
alimentation animale et humaine, est la plus importante des
grandes cultures françaises, avec 35 millions de tonnes
produites par an, dont plus de la moitié est exportée. Lors de
leur inscription sur le catalogue officiel des semences, les
variétés de blé tendre d’hiver sont évaluées selon des méthodes
bien codifiées par le CTPS (1). Actuellement, ces méthodes
privilégient l’évaluation du rendement de chaque variété dans un
milieu donné, ainsi que l’évaluation de la résistance des
variétés aux maladies dans des essais pratiqués avec et sans
traitements fongicides. Il est aujourd’hui souhaitable, et
intéressant économiquement, de développer des itinéraires
techniques dits « bas intrants », dans lesquels l’ensemble des
intrants est réduit : fongicides, mais aussi engrais azotés,
quantité de semences, régulateurs de croissance. Des agronomes
et des généticiens de l’INRA ont développé un programme de
recherche pour caractériser les meilleurs couples variétés /
itinéraires bas intrants.
Développer les itinéraires
techniques à bas intrants
Dans les années 1980, l’INRA
a mis au point des itinéraires de production de blé tendre
d’hiver moins consommateurs d’intrants en acceptant un rendement
inférieur au rendement potentiel. Ils permettent de semer moins
dense et de réduire la fertilisation azotée, ce qui diminue les
risques de verse, de ravageurs, de maladies et en conséquence
les traitements phytosanitaires et les régulateurs de
croissance. Ces itinéraires présentent à la fois un intérêt
environnemental et un équilibre économique dû à la réduction
d’utilisation d’engrais et de produits phytosanitaires.
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©INRA/J. Weber
Réf. : PCD0023-IMG0023.PCDBlé tendre
d’hiver, variété Audace, mise au point par
l’INRA, très résistante aux maladies. |
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Parallèlement, les
sélectionneurs ont conduit des stratégies à long terme pour
proposer de nouvelles variétés adaptées à ces itinéraires
techniques à bas intrants. Balthazar, Cézanne, Oratorio,
Virtuose, Caphorn, Farandole cumulent productivité et résistance
aux maladies. Cependant, ces variétés sont encore peu utilisées
et rarement couplées à des itinéraires à bas intrants. Cette
constatation incite à élargir la diffusion des résultats
expérimentaux et à élaborer des outils d’aide à la décision pour
les conseillers agricoles et les agriculteurs.
Caractériser les milieux à
faibles niveaux d’intrants pour mieux évaluer les variétés
Des chercheurs de l’INRA
travaillant dans trois disciplines : agronomie, génétique,
ergonomie, ont uni leurs efforts pour élaborer un outil
informatique de diagnostic variétal : « DIAGVAR ». Cet outil
permet d’identifier, sur chaque essai d’un réseau d’essais de
variétés, les facteurs qui ont limité le rendement de la culture
et d’en quantifier les effets. Ceci est très utile car dans des
itinéraires techniques à bas niveaux d’intrants, il y a
davantage de facteurs qui sont susceptibles de limiter la
croissance et la production que dans des modes de conduite
conventionnels : la diminution de la fertilisation azotée induit
une période de carence azotée, la réduction de l’usage de
fongicides risque de provoquer une augmentation de la présence
de maladies, la réduction des apports d’eau peut induire un plus
grand risque de sécheresse.
Avec « DIAG-VAR », pour telle variété, on pourra calculer par
exemple, que la diminution de rendement est due pour 15%, au
stress hydrique, pour 20% à la septoriose pendant la montaison,
etc... Cette méthode de calcul est particulièrement utile pour
les facteurs dont les effets ne sont pas faciles à observer sur
la plante : stress hydrique, carence en azote, températures
extrêmes, défaut de rayonnement. Cette méthode a été programmée
dans un logiciel opérationnel actuellement en cours de test chez
des partenaires (GEVES (2), obtenteurs et Arvalis-Institut du
végétal).
Caractériser le comportement
des variétés
A partir de la méthode
DIAG-VAR, un traitement mathématique permet de calculer la
sensibilité de chaque variété à chaque facteur limitant.
Parmi ces caractéristiques variétales, les chercheurs de l’INRA
s’intéressent particulièrement à la capacité d’utilisation de
l’azote, capacité difficile à évaluer actuellement en sélection,
faute de méthodes souples et faciles d’accès. Les variétés
capables de valoriser de faibles apports en azote possèdent soit
une meilleure capacité d’absorption de l’azote du sol, soit une
meilleure tolérance à des épisodes de carence en azote. Les
chercheurs de l’INRA ont mis au point des indicateurs pour
connaître l’état de nutrition azotée des plantes pendant les
phases clés de leur cycle. Ils cherchent maintenant des
indicateurs susceptibles d’être mis en oeuvre à grande échelle,
dans des essais de sélection ou d’inscription. La capacité de
valorisation de l’azote pourrait ainsi être prise en compte
comme nouveau critère lors de l’inscription des variétés au
catalogue, montrant ainsi la contribution de la sélection
variétale à une agriculture plus durable.
D’autre part, les scientifiques de l’INRA cherchent à mieux
caractériser la résistance variétale aux maladies. La septoriose
(Septoria tritici) est devenue en 10 ans la principale maladie
du blé en France. Pour établir une « notation » des variétés
pour la résistance à cette maladie, les chercheurs ont appliqué
une méthode de traitement statistique à un grand nombre de
données issues des essais disponibles. Sur les essais du CTPS
avec et sans fongicides, ils ont évalué le degré de sensibilité
des différentes variétés à la septoriose. Cette méthode est en
cours de transfert afin qu’elle soit utilisée dans des essais
d’évaluation des variétés.
(1)CTPS : Comité technique
permanent de la sélection des plantes cultivées. Composé
d’experts nommés par les pouvoirs publics, il examine et
statue sur les dossiers de demande d’inscription des
variétés au catalogue officiel.
(2)GEVES : Groupe d'étude et de contrôle des variétés et des
semences. C’est une structure permanente, composée de
salariés, qui effectue les tests en laboratoire et en champ
en vue de l’instruction du dossier d’inscription des
variétés.
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