Daniel Chéron Directeur général adjoint de Limagrain et Président du comité exécutif de Biogemma: oui aux OGM, dans une démarche au cas par cas

May 15, 2003

Daniel Chéron Directeur général adjoint de Limagrain et Président du comité exécutif de Biogemma donne son point de vue sur la levée du moratoire et la place des PGM dans l’agriculture de demain. Ce texte a été publié dans la revue NATURE&PROGRES n°41 de mai-juin 2003

Par Daniel Chéron,
Président du Comité exécutif de Biogemma

Les plantes transgéniques sont aujourd’hui cultivées dans le monde sur plus de 50 millions d’hectares, dont plus de la moitié aux Etats-Unis. Ces cultures se développent à un rythme de 10% par an… sauf dans l’Union Européenne où un moratoire sur la commercialisation des plantes génétiquement modifiées a été institué en 1998. Ce contexte crée progressivement une exception de l’agriculture européenne qui n’est pas tenable dans la durée, l’innovation conditionnant, avec l’organisation équitable des marchés, la place que notre secteur agricole et alimentaire tiendra demain sur la scène internationale. Il ne s’agit pas de présenter les OGM comme une panacée. Ni de prétendre que l’agriculture du 21° siècle sera OGM ou ne sera pas. Il s’agit bien de mesurer le risque, économique et social, que prendrait l’Europe si elle se privait durablement d’une technologie qui, dans un certain nombre de cas, est à même de répondre aux grands défis de l’agriculture : réduction des traitements chimiques, économie des ressources en eau, compétitivité des productions, qualité et sûreté des aliments…

C’est pour que l’Europe ne rate pas ce virage technologique, et que les agriculteurs soient les premiers acteurs de ce champ d’innovation, que nous avons créé il y a cinq ans, avec d’autres entreprises agricoles, une structure de recherche en biotechnologies végétales : Biogemma (1). Les travaux menés par les chercheurs de Biogemma s’inscrivent dans une longue histoire de l’amélioration des plantes qui, on l’oublie trop souvent, a contribué pour une grande part au progrès général de l’agriculture. Cette histoire a connu une première accélération prodigieuse au milieu du XIX° siècle avec les découvertes du moine Mendel, le père de la génétique, et les travaux de Louis de Vilmorin, gentleman-farmer français qui inventa la méthode de la sélection généalogique. Le principe ? Isoler, choisir et croiser différentes plantes avant d’auto-féconder leurs descendances. Le blé que nous connaissons est le fruit de ces techniques: un blé vigoureux et homogène qui ne verse plus, comme hier, sous le poids des grains… Cent ans plus tard - en 1953 précisément – nouveau bond en avant. Deux chercheurs, James Watson et Francis Crick, découvrent la structure en double hélice de l’ADN, le vecteur de l’hérédité. C’est le début de l’ère de la biologie moléculaire et bientôt, dans les années 80, la mise au point de technologies qui vont permettre un développement formidable des connaissances sur les gènes, leur fonctionnement et leur régulation.

Cette science nouvelle, qu’on appelle la génomique, est aujourd’hui au cœur des missions de Biogemma . De même que l’analyse du génome humain ouvre d’immenses perspectives en terme de santé, la lecture des gènes des principales plantes cultivées permet de mieux appréhender leur diversité génétique et de préciser, grâce à des marqueurs moléculaires, le travail de création variétale. Parmi ces techniques d’étude du vivant, la transgénèse est devenue un outil d’importance capitale. Consistant à modifier un génome par génie génétique, elle est utilisée en routine par la communauté scientifique pour produire de nouvelles connaissances fondamentales. Mais elle est aussi appliquée pour que des plantes développent des propriétés nouvelles qu’il est difficile, parfois même impossible, d’obtenir par les techniques classiques de croisement : des caractéristiques agronomiques ou qualitatives importantes, comme, par exemple, la tolérance du maïs à la sécheresse. En introduisant un gène de sorgho dans le génome du maïs, Biogemma a ainsi réussi à créer des plantes capables de mieux utiliser l’eau disponible.

Au nom de quoi se priver de telles innovations, dès lors qu’elles ont fait la preuve de leur utilité et qu’elles ont franchi avec succès toutes les étapes d’évaluation des risques exigées par la réglementation européenne ?

Il est temps de sortir de ce statu quo et de retrouver une ambition. Comment ? En créant les conditions d’un meilleur dialogue entre le monde agricole et la société (2) ; en finalisant également au plus vite l’environnement réglementaire européen qui garantira une véritable liberté de choix du consommateur : c’est toute la question actuellement débattue des critères de coexistence des différents types de cultures (bio, conventionnelle, OGM…), coexistence à laquelle nous sommes profondément attachés; enfin, ne l’oublions pas, en continuant avec persévérance d’étudier, d’évaluer et de tester les plantes de demain, en laboratoire, en serre, mais aussi au champ, ultime et indispensable étape de validation dans des conditions réelles de culture qui, trop souvent, est entravée par des campagnes d’arrachage.

Encore une fois, si nous voulons que l’agriculture européenne relève les missions que lui assigne aujourd’hui avec force la société - la fourniture de produits de qualité et la contribution à un meilleur environnement – il nous faut impérativement poursuivre ce long travail d’amélioration des plantes et créer de nouvelles variétés végétales : des variétés OGM ou non OGM selon le caractère recherché, mais dans tous les cas, sûres, innovantes et utiles.

(1) Biogemma est la seule entreprise de recherche en biotechnologies végétales issue du monde agricole, financée et dirigée par des agriculteurs. Ses actionnaires sont les groupes cooopératifs Limagrain et Euralis, la société de semences RAGT et les organismes financiers des filières agricoles Unigrains et Sofiprotéol. Biogemma réunit plus de 100 chercheurs et techniciens, avec un budget de recherche de 19 millions d’euros.

(2) Dans le cadre de sa charte d’engagement, Biogemma a crée le comité Cultura, une instance de débat qui accueille, aux côtés des dirigeants et des responsables scientifiques de l’entreprise, des représentants d’organisations agricoles couvrant toute la diversité des productions agricoles françaises (céréales, polyculture, élevage, agriculture spécialisée). Son but est de promouvoir une approche globale « agriculture, recherche et société ». Les minutes de la première réunion sont consultables sur le site internet de Biogemma : www.biogemma.com

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